On a vu en 3.2 deux notions subordonnées situées à un même niveau d'une arborescence sont dites coordonnées. Il peut s'agir de co-hyponymes distingués en fonction d'un même critère de subdivision ou de co-méronymes distingués en fonction d'un même type de lien partie-tout.
Dans un article intitulé L'inversion d'un rapport notionnel et les symboles correspondants utilisés en terminographie, Wüster (1974) aborde le problème du classement des notions coordonnées et propose divers critères fondés sur la numérotation, la succession temporelle, l'antonymie, etc. Ces propositions se retrouvent implicitement dans l'étude des hiérarchies "non arborescentes" présentée par (Cruse (1986 : 181-195) dans Lexical Semantics. Cette dernière étude, clairement inspirée de Lyons (1977), nous semble proposer divers concepts particulièrement utiles à une analyse des relations coordonnées.
La chaîne se caractérise par un ordonnancement séquentiel unique. Cruse fournit divers exemples, qui concernent aussi bien la relation méronymique composant-objet (CO) que la relation méronymique TT "être une tranche temporelle de". De nombreuses relations spatiales entre co-hyponymes semblent répondre à ce modèle dans le domaine de la marine.
L'organisation hélicoïdale est un cas particulier de chaînage caractérisé par la combinaison des aspects linéaire et cyclique. Les notions se succèdent dans un ordre circulaire, de telle sorte qu'arrivé à l'unité maximale, on revient à l'unité minimale, mais en ayant progressé dans le temps ou dans l'espace. On citera l'exemple du système métrique pour l'aspect spatial et celui des jours, mois et saisons pour l'aspect temporel :
Les cycles, ou chaînages circulaires sans progression, sont très rares selon Cruse, qui cite le cas des couleurs organisées circulairement sur le spectre. En terminologie nautique, on peut découvrir d'autres exemples, comme celui des marées, de la rose des vents ou de tout système régulier d'alternance des vents.
Le chaînage hiérarchique en dehors de toute relation méronymique est parfois difficilement identifiable à une relation de type spatio-temporel. Ainsi en va-t-il des degrés de l'échelle de Beaufort, de l'intensité de la pression propre à tel ou tel type de machine à vapeur, de la hiérarchie militaire, etc. A ce sujet, Cruse (1986 : 192-195) établit une distinction selon le genre d'échelle sous-jacente.
L'antonymie nous paraît constituer tout à la fois un modèle d'ordonnancement de faible rendement et un concept très complexe à saisir. Le faible rendement tient au fait qu'une relation d'antonymie ne concerne normalement que deux notions opposées en vertu d'un même caractère différenciateur. La complexité s'explique, quant à elle, par plusieurs facteurs et d'abord par le fait qu'un grand nombre d'antonymes exploitent une relation spatiale. Si l'on considère qu'il n'y a de chaînage qu'à partir du moment où au moins trois notions sont liées par la relation, il convient de considérer de nombreuses notions comme antonymes.
Ensuite, il faut observer que la notion d'antonymie permet d'isoler des relations qui échappent à tout étiquetage, à moins de leur attribuer un nom particulier. Des concepts spatiaux comme interne vs externe, direct vs indirect, horizontal vs vertical, bâbord vs tribord, au vent vs sous le vent, etc. nous semblent bel et bien servir de traits distinctifs à des co-hyponymes unis par une relation d'opposition. Les relations ainsi mises en jeu méritent d'être identifiées, sinon par les classifications de Cruse (1986), au moins par l'expression antonyme spatial.
Par ailleurs, on remarquera que l'existence d'une notion désignée à l'aide de l'un des adjectifs cités ci-dessus n'implique pas nécessairement l'existence d'un antonyme (p. ex., chez Paasch (1901), on trouve internal pipe (= tuyau extérieur, 180) et non °external pipe, internal block (= poulie à estrope interne, 367) et non °external block). Ceci nous amène à souligner une nouvelle fois que dans un cadre multilingue, il faut éviter d'établir un lien notionnel sur la seule base formelle : il ne suffit pas que deux termes s'opposent au sein d'une même famille lexicale pour que cette opposition soit reconnue comme pertinente d'un point de vue notionnel.
La prise en compte d'une relation d'antonymie est utile dans la mesure où elle rend compte d'une différenciation notionnelle. Il ne semble pas nécessaire, dans ce cadre, de dresser une fine typologie des antonymies : la perception du trait distinctif paraît beaucoup plus importante. Ceci est d'autant plus vrai que de nombreuses oppositions ne sont ni spatiales ni temporelles et exploitent un trait distinctif propre aux réalités rencontrées ('à hélice' vs 'à aubes', 'à une hélice' vs 'à deux hélices', 'à arbre long' vs 'à arbre court', etc.).
Critère = moment